Traduit de l’américain par Dominique Perrin.
À l’automne 2018, dans le cadre de la politique de transition énergétique, le président français Emmanuel Macron a annoncé une augmentation des taxes sur les carburants.
Cette mesure a suscité une protestation d’ampleur nationale de la part des automobilistes français, qui se signalaient par le port d’un gilet jaune. Ce vêtement leur a valu le surnom de « gilets jaunes ».
Bien que cette protestation ait commencé comme un mouvement social « populaire et non partisan », les gilets jaunes ont bénéficié du soutien des syndicats et d’un ensemble disparate de cadres politiques, de l’extrême gauche à l’extrême droite.
Le mouvement avait commencé comme une réaction contre de nouvelles taxes. De nombreux observateurs internationaux ont donc cru que les manifestants défendaient la liberté économique. Mais ils réclamaient en réalité un État-providence plus fort, des dépenses plus importantes pour les « services publics » et l’augmentation des impôts pour les plus riches.
Le mouvement a eu un fort impact à l’étranger parmi les opposants aux mondialistes et aux bureaucrates européens, un groupe auquel on peut rattacher le président Macron.
Avec le temps, l’esprit des « gilets jaunes » a commencé à se répandre dans d’autres pays européens. C’est le cas en Espagne, où les agriculteurs ont utilisé des tactiques similaires en faveur d’un État-providence plus présent.
À partir du mois dernier, avant que la distanciation sociale exigée par l’épidémie de coronavirus ne rende impossibles les manifestations de masse, les agriculteurs ont lancé des actions du même type dans certaines régions d’Espagne. Ils ont même bloqué des routes dans les provinces de Jaén, Séville, Badajoz et Cáceres.
Ils ont eux aussi été soutenus par des syndicats, qu’ils soient d’agriculteurs ou généralistes, ainsi que par des partis politiques de toutes tendances : Podemos, le Parti du peuple, la Gauche unie, la Coalition ADÑ, ou encore Vox.
Les agriculteurs protestent contre l’écart entre le prix final de vente au détail des fruits et légumes et le montant qui leur est versé. Ils affirment qu’on les trompe et qu’une grande partie des bénéfices est siphonnée par les grandes entreprises. Mais leur colère est le fruit d’un manque de compréhension des mécanismes économiques.
Les manifestants semblent oublier qu’ils font partie d’une chaîne de distribution qui comprend la production, la transformation, le stockage, l’emballage, l’expédition et la distribution au détail. Les chiffres du ministère de l’Agriculture montrent que près de 46 % du coût final peut être attribué aux producteurs, alors la distribution au détail ne pèse que 1,5 % de ce coût. C’est le cas par exemple pour les principaux supermarchés en Espagne, tels que Mercadona, DIA et Carrefour.
Le diagnostic économique des agriculteurs semble également erroné en ce qui concerne les impôts.
L’indice de liberté économique 2019 de la Fondation Heritage souligne le poids de la fiscalité espagnole. Cette charge pèse sur l’agriculture. Les agriculteurs doivent eux aussi payer l’impôt sur le revenu, qui peut dépasser les 40 %. Tout le monde paie la taxe sur la valeur ajoutée, qui devrait augmenter de deux points, passant de 21 à 23 %. Les droits de succession frappent particulièrement les agriculteurs. On peut ajouter encore les taxes régionales et locales, et l’impact de toutes les réglementations agricoles.
En outre, des régions comme l’Estrémadure et l’Andalousie sont ciblées par le plan pour l’emploi rural (PER en espagnol), un programme de l’État qui en réalité contribue à un taux de chômage élevé.
L’Espagne est l’un des principaux pays bénéficiaires de la politique agricole commune, qui subventionne les agriculteurs et impose des droits de douane sur les denrées alimentaires provenant de l’extérieur de l’Union européenne. Ce plan protectionniste alimente la stagnation de l’agriculture européenne.
En réponse à une manifestation à Séville, le conseil des ministres a publié une liste de « mesures urgentes » concernant l’agriculture. Ce plan comprend les projets suivants :
- interdire aux industries et aux distributeurs de vendre des produits en dessous des coûts de production ;
- inclure dans les contrats commerciaux avec les agriculteurs une référence aux coûts de production ;
- réduire les exigences pour l’obtention de la subvention PER.
En conséquence, les supermarchés ne pourront plus offrir aux consommateurs certaines réductions.
Il est certain que l’interventionnisme économique nuit à l’agriculture. Car la taxation plus lourde qui est imposée va au-delà de ce que requièrent les simples tableaux et estimations macroéconomiques.
Des taxes plus élevées et des réglementations plus sévères empêchent les entrepreneurs de réaliser pleinement leur vision et de mettre les personnes au travail, ce dont on a terriblement besoin en ces temps d’incertitude économique.
La nature est la création de Dieu, un don qui doit être développé et transformé par l’effort de l’humanité pour atteindre des niveaux plus élevés de prospérité sociale et économique. Nous devrions nous opposer à tout régime fiscal ou réglementaire qui empêche les hommes de respecter ce devoir.